SD Worx a analysé les fiches de paie de plus de 110 000 employés belges du secteur privé. Que constate-t-on ? Presque la moitié des employés, cadres et membres de direction belges perçoit un salaire variable, soit une hausse de l'ordre de 6 % par rapport à il y a trois ans. La rémunération variable gagne donc en popularité, mais les employeurs n'en exploitent pas (encore) pleinement toutes les possibilités.
Le salaire variable est un terme qui regroupe plusieurs formes de rémunérations liées à certaines prestations et basées sur des résultats financiers et non financiers. L'éventail de possibilités s'est élargi au fil des ans. Outre les bonus, primes et commissions « traditionnels », il existe également des avantages non récurrents liés aux prestations (ANRLAP) tels que le bonus salarial collectif prévus par la CCT n°90 ou les warrants. Et grâce à l'accord estival du gouvernement, nous pourrons bientôt y ajouter la prime sur bénéfice.
Quel avantage ? Que ce soit pour l'employeur ou le travailleur, il existe des alternatives fiscalement intéressantes pour augmenter le salaire brut. Les entreprises paient moins d'impôts sur ce dernier et les collaborateurs voient à leur tour le montant moins amputé par l'ONSS et autres retenues.
Surtout plus de bonus, de primes et de warrants
La rémunération sur la base des efforts ou des résultats progresse de plus en plus : en 2014, seuls 40,7 % des travailleurs du secteur privé percevaient un salaire variable. En 2017, on est déjà à 46,9 %. Il y a bien entendu des conventions sectorielles, mais l'employeur et le travailleur peuvent relativement librement déterminer les conditions de perception d'une partie variable du salaire.
Il s'agit le plus souvent de bonus, de primes ou de commissions qui sont attribuées : 37,2 % des employés, cadres et membres de direction belges perçoivent ce type de rémunération variable. En 2014, ce chiffre était de 31 %. Plus d'employeurs font également appel aux warrants : pour 5 % des travailleurs, des options sur actions font partie du paquet salarial, contre 3,7 % en 2014. Pour le bonus salarial collectif CCT n°90, il n'y a pas de différence significative entre la situation actuelle et celle d'il y a trois ans. Presque 15 % des entreprises octroient ce bonus.
Occasions manquées
L'essor des rémunérations variables est peut-être lancé, mais il reste encore un long chemin à parcourir. D'après nos chiffres, le nombre, par exemple, de collaborateurs qui reçoivent des warrants a presque augmenté de moitié. En apparence, il s'agit d'une évolution positive, mais la part octroyée reste tout de même très basse. C'est dommage, car les entreprises perdent ainsi une occasion de récompenser davantage leurs collaborateurs. Le grand avantage des options sur actions est qu'elles sont exonérées de cotisations ONSS. Nous avions dès lors prévu que la popularité de cette alternative allait croître plus rapidement. Quant au bonus salarial collectif octroyé dans le cadre de la CCT n°90 et présentant également un avantage fiscal, peu d'entreprises en font usage.
De grandes différences sectorielles et régionales
Le recours au salaire variable diffère encore aujourd'hui beaucoup d'un secteur à l'autre. Dans le secteur de la chimie, le système est de loin le plus populaire : environ 70 % des travailleurs y perçoivent des primes, des bonus, des commissions, des bonus salariaux ou des warrants. Et deux entreprises pharmaceutiques sur trois (64 %) prévoient une partie variable de leur rémunération. C'est cependant dans les secteurs des services sociaux et médicaux que les avantages sont le moins intégrés (30 %).
Outre des différences sectorielles, il existe également des nuances régionales frappantes. En effet, le salaire variable est plus populaire en Wallonie (54,1 %) qu’à Bruxelles (49,3 %) et en Flandre (44,9 %). De nombreux facteurs expliquent cette situation : au sud de la frontière linguistique, l'industrie est plus fortement représentée. Des primes pour conditions de travail y sont plus souvent octroyées, notamment pour le travail en équipe.
La prime sur bénéfice, nouvelle venue dans l'offre
Dans le cadre de l'accord estival, le gouvernement fédéral a lancé la prime sur bénéfice. À partir de 2018, elle permettra aux entreprises d'octroyer le bénéfice d'un exercice comptable – ou une partie de ce bénéfice – à leurs travailleurs au titre de bonus. Cette nouvelle possibilité offre beaucoup de potentiel. Le travailleur perçoit un montant net bien plus élevé de ce type de bonus que d'un bonus traditionnel ou d'un bonus octroyé dans le cadre de la CCT n°90. Pour l'employeur, il est également plus simple à introduire car il requiert moins de tracasseries administratives. Enfin, il peut également être plus généreux : le montant total des primes sur les bénéfices peut atteindre 30 % de la masse salariale.
Cependant, le nouveau système a également ses limites. La prime sur bénéfice doit être associée à un objectif de résultat. Afin de pouvoir octroyer le bonus dans le cadre de la CCT n°90, en revanche, l'employeur dispose de davantage de possibilités : une hausse de la satisfaction des clients, par exemple, ou une baisse du nombre d'accidents de travail. En outre, il s'agit d'un avantage collectif, ce qui signifie que tous les travailleurs doivent percevoir la prime sur bénéfice.
Il est encore trop tôt pour affirmer que les entreprises vont massivement opter pour la prime sur bénéfice. Il est néanmoins vrai qu'elles sont petit à petit en train de découvrir les différentes possibilités de rémunérations variables et les avantages qui y sont liés, à la fois pour leurs travailleurs ainsi que pour elles-mêmes.